lettres malgaches 25

Publié le par tontonjef








Henri à Roivivant, le jour de Ste Sida

 

 

Vieux marin barbu, amateur de femmes, entouré d’amis et de compagnons d’aventure, bavard et buveur, je ne suis qu’une ombre mais je ne lâcherais pas une heure de vie depuis que j’ai senti qu’elle pouvait s’en aller. Je n’ai plus droit au stress et j’aime encore le combat, c’est plus fort que moi. Ma rigueur habituelle devient rigidité et mon raisonnement s’accroche à ma mémoire ; celle-ci, j’ai l’impression, défaille dans maintes circonstances, m’oblige à vérifier si je n’ai rien oublié, mes clefs, mes médicaments, si j’ai bien appliqué ou expliqué la procédure, sensée éviter la vérification.

Nous avons bien rigolé sur le bateau quand je t’ai raconté la croisière en Méditerranée où j’ai rencontré la journaliste qui m’a ruiné. Par contre, j’ai de mauvaises nouvelles à te donner de notre ami Georges : il était parti en croisière avec son beau-frère pour rejoindre Madagascar par le canal de Suez et la Mer Rouge. J’ai appris qu’il avait renoncé à cause des risques de piratage, dont il eut connaissance grâce aux services maritimes français présents dans cette zone. Il sera prochainement de retour avec son bateau dans les eaux du Golf du Lion.

Cette mésaventure ravive les souvenirs anciens d’un grand aventurier rencontré au cours d’une soirée magnifique dans une petite vallée pyrénéenne appelée la vallée heureuse : un navigateur belge hors pair, compagnon d’aventure de Jacques Brel aux Marquises. Il contait sa traversée de la Mer Rouge à la fin des années 70, 79 ou 80, je ne m’en souviens plus. Après 10 ans de navigation à bord de sa goélette de 18 mètres, en route vers la mer Méditerranée, il avait installé, sur le deck, une mitrailleuse achetée à Djibouti, dans le détroit de Bab el Mandab, à des marins français, en échange de quelques bouteilles de scotch frelaté dont la cale regorgeait. Pendant la traversée de la mer Rouge, avec l’aide de sa courageuse compagne, avant qu’ils ne viennent à l’abordage, il fit reculer les pirates en tirant des salves de mitrailles de jour comme de nuit. L’aventure de notre ami Georges semble prouver que ces conditions de navigation n’ont guère évolué depuis 30 ans dans cette partie du monde.

Malgré l’échec de l’expérience africaine avec les pompes hydrauliques, je conviens que la situation des populations privées d’énergie est dramatique et que tu as raison d’essayer de trouver des partenaires et des bénévoles pour développer le tourisme en apportant des outils et des clients  amoureux comme nous des voies d’eaux douces, fleuves et rivières, canaux, artères et vaisseaux de la planète, chère à mon cœur défaillant, assisté par une pile.

A bientôt sur mon bateau.

 

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Publié dans Actualité

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